PRISE EN CHARGE MEDICALE D’UN CHIEN ATTEINT DE MALADIE ...



PRISE EN CHARGE MEDICALE D’UN CHIEN ATTEINT DE MALADIE VALVULAIRE DEGENERATIVE

INTRODUCTION

La maladie valvulaire dégénérative des valves atrio-ventriculaires (MVD), encore appelée endocardiose, est la maladie cardiaque dite acquise la plus fréquente dans l’espèce canine, toutes races confondues. Elle correspond à une dégénérescence myxomateuse progressive de la valve mitrale, moins fréquemment de la valve tricuspide, entraînant une insuffisance valvulaire. C’est une maladie à évolution lente ; plusieurs années peuvent s’écouler entre la découverte d’un souffle cardiaque et l’apparition de signes cliniques d’insuffisance cardiaque. Cependant, une fois déclarée cliniquement, l’évolution de la maladie s’accélère et la plupart des chiens symptomatiques meurent ou sont euthanasiés parce qu’ils développent finalement une insuffisance cardiaque réfractaire au traitement médical. Ainsi, de par son importance épidémiologique et son caractère actuellement encore incurable, la MVD représente un véritable challenge pour le vétérinaire praticien ; il doit identifier les chiens à risque, établir le diagnostic le plus précocément possible, déterminer précisément le stade d’évolution de la maladie et, en fonction de chaque situation, adapter la thérapeutique de manière raisonnée et donner un pronostic au propriétaire.

En quelques années, l’approche clinique de la MVD a été bouleversée. L’échocardiographie devenant plus accessible au praticien, le diagnostic précoce de la maladie a été grandement facilité. L’arsenal thérapeutique cardiovasculaire disponible s’est aussi largement élargi, permettant au vétérinaire d’adapter de manière plus précise le traitement. Enfin, la connaissance accrue de la physiopathologie de la maladie a ouvert de nouveaux horizons diagnostiques, thérapeutiques et pronostiques remettant aussi en question bien des idées reçues. Un récent consensus a été établi par les membres de l’Acvim concernant la prise en charge d’un chien atteint de maladie valvulaire dégénérative. Cependant, de nombreux traitements restent, aujourd’hui encore, sujets à controverse au sein de la communauté scientifique vétérinaire. Les études et essais cliniques à venir devraient préciser l’intérêt de l’utilisation de ces traitements et faciliter les décisions thérapeutiques auxquelles sont confrontés les vétérinaires praticiens.

Ce document se propose dans une première partie de faire le point sur les connaissances bibliographiques concernant l’épidémiologie, l’étiologie, la physiopathologie, la clinique, le diagnostic et le pronostic de la maladie valvulaire dégénérative. La seconde partie passe en revue les principales classes thérapeutiques utilisées ; leurs indications lors d’endocardiose sont discutées sur la base du principe de la médecine factuelle et grâce à une lecture critique des principaux essais cliniques. La troisième partie se veut pratique et synthétique ; la prise en charge d’un chien atteint de MVD est détaillée prenant en compte la majorité des situations auxquelles le praticien vétérinaire peut être confronté.

A. PRESENTATION DE LA MALADIE VALVULAIRE DEGENERATIVE

I. DEFINITIONS

a. Maladie valvulaire dégénérative et insuffisance valvulaire

La maladie valvulaire dégénérative correspond à un processus dégénératif chronique de la valve mitrale et moins fréquemment de la valve tricuspide. De nombreux synonymes lui ont été attribués tels que : endocardiose valvulaire ou dégénérescence valvulaire myxoïde. On retrouve dans les espèces porcines, équines et chez l’Homme, des entités similaires à la maladie valvulaire dégénérative du chien.

Häggström J., Kvart C., Pedersen HD (2005)

Acquired Valvular Heart Disease

In : Ettinger SJ, Feldman EC, editors, Textbook of veterinary internal medicine, diseases of the dog and cat. St-Louis: Elsevier Saunders; 2005, 1022-35

Le processus dégénératif caractérisant la maladie valvulaire dégénérative est à l’origine d’une insuffisance valvulaire ; le défaut d’étanchéité des feuillets valvulaires lors de la systole ventriculaire induit un reflux de sang du ventricule vers l’atrium. Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, cette régurgitation systolique s’aggrave et est responsable d’une atteinte de la fonction cardiaque.

Chez le chien, l’insuffisance valvulaire peut se retrouver dans d’autres maladies cardiaques (dysplasie valvulaire, endocardite ou myocardiopathie dilatée par exemple) mais la maladie valvulaire dégénérative en la des cause principale.

Häggström J., Kvart C., Pedersen HD (2005)

Acquired Valvular Heart Disease

In : Ettinger SJ, Feldman EC, editors, Textbook of veterinary internal medicine, diseases of the dog and cat. St-Louis: Elsevier Saunders; 2005, 1022-35

Chetboul V (2006)

Traitement de l’insuffisance mitrale chez le chien

Prat. Vét. Anim. Cie. 2006; 31: 7-10

b. Insuffisance cardiaque

L’insuffisance valvulaire contribue au développement d’une insuffisance cardiaque, stade ultime de la maladie valvulaire dégénérative. L’insuffisance cardiaque correspond à un syndrome et non à une maladie en particulier. C’est une situation pathologique au cours de laquelle le cœur ne peut maintenir un débit cardiaque suffisant au maintien des pressions sanguines ni à la perfusion de tous les tissus de l’organisme. Concomitamment à cette insuffisance cardiaque circulatoire des signes de congestion apparaissent (œdème pulmonaire, épanchement pleural et/ou ascite) et prédominent au sein du tableau clinique.

L’insuffisance cardiaque est elle aussi d’évolution progressive ; d’abord bien compensée (absence de signe clinique) elle devient mal compensée (apparition de signes cliniques) avec l’aggravation de la maladie et de la régurgitation valvulaire.

Elle est elle-même responsable de l’activation de l’ensemble des mécanismes compensateurs associés à la physiopathologie de la maladie valvulaire dégénérative.

Keene BW, Bonagura JD (2009)

Management of heart failure in dogs

In: Bonagure JD, Twedt DC, editors, Kirk’s current veterinary therapy, small animal practice. St-Louis: Elsevier Saunders; 2009, 769-86

II. ÉTIOLOGIE

L’étiologie exacte de la maladie valvulaire dégénérative est aujourd’hui encore inconnue. Il semblerait cependant que la dégénérescence myxoïde soit le résultat d’une succession de processus lésionnels au niveau de la valvule (traumatismes répétés notamment au niveau des feuillets) associée à un terrain génétique prédisposant (anomalie des composants de la matrice extracellulaire dont le collagène et les glycosaminoglycanes (GAG)).

Häggström J, Duelund Pedersen H, Kvart C (2004)

New insights into degenerative mitral valve disease in dogs

Vet Clin North Am Small Anim Pract. 2004; 34: 1209-26

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In: Fox PR, Sisson D, Moïse NS, editors, 2nd ed. Philadelphia: WB Saunders, Textbook of canine and feline cardiology: principles and clinical practice ; 536-565

a. Modifications histologiques et structurales

1. Modifications histologiques

La dégénérescence myxoïde qui caractérise la maladie valvulaire dégénérative peut toucher les 4 valves cardiaques. Les valves aortiques et pulmonaires sont cependant rarement atteintes. La valve mitrale est la plus fréquemment touchée ; dans plus de 60% des cas, elle est atteinte de manière isolée alors que la valve tricuspide est très rarement touchée seule (moins de 2% des cas). Une atteinte simultanée de la valve mitrale et tricuspide est relativement fréquente dans plus de 30% des cas.

Buchanan JW (1977)

Chronic valvular disease (endocardiosis) in dogs

Advt Vet Sci. 1977; 21: 57-10

Kittleson MD (1998)

Myxomatous atrioventricular degeneration

In: Kittleson MD, Kienle RD, editors, Mosby, Small animal cardiovascular medecine; 297-318

L’atteinte myxoïde peut toucher l’ensemble de l’appareil valvulaire, mais les modifications les plus avancées se localisent préférentiellement au niveau des feuillets valvulaires. Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, les lésions progressent jusqu’à atteindre les cordages tendineux. Localement, la répartition des lésions se fait de manière totalement arbitraire : à un même stade de la maladie et sur un même feuillet, certaines zones sont plus atteintes que d’autre et les lésions les plus sévères peuvent côtoyer un tissu totalement sain.

Häggström J., Kvart C., Pedersen HD (2005)

Acquired Valvular Heart Disease

In : Ettinger SJ, Feldman EC, editors, Textbook of veterinary internal medicine, diseases of the dog and cat. St-Louis: Elsevier Saunders; 2005, 1022-35

| |

|L’appareil valvulaire est constitué des feuillets valvulaires, des cordages tendineux, de l’anneau fibreux et des deux muscles papillaires. |

|La valve mitrale s’organise en deux feuillets : un grand feuillet (feuillet septal ou antérieur) et un petit feuillet (feuillet pariétal ou |

|postérieur). Chaque feuillet est reliée au muscle papillaire correspondant par des cordages tendineux de premier ordre (s’attachant sur le |

|bord libre des feuillets) et second ordre (s’attachant sur la face ventriculaire des feuillets). |

| |

|[pic] |

|Figure 1a : Coupe longitudinale théorique du ventricule gauche |

| |

|Les feuillets valvulaires sont constitués histologiquement de 4 couches distinctes : |

|- atrialis : fine couche de cellules endothéliales reposant sur du tissu conjonctif et une fine couche de cellules musculaires lisses. |

|- spongiosa : ensemble de fibres de collagène, de fibres élastiques et de fibroblastes notamment contenus dans une matrice riche en |

|glycosaminoglycanes. |

|- fibrosa : couche dense et compacte de fibres de collagène en continuité avec l’anneau fibreux valvulaire et la partie centrale des cordages |

|tendineux. |

|- ventricularis : même organisation que l’atrialis mais sans les cellules musculaires lisses. |

| |

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|Figure 1b : Différentes couches histologiques des feuillets valvulaires |

| |

FIGURE : Anatomie et histologie de la valve mitrale.

D’après :

Kittleson MD (1998)

Myxomatous atrioventricular degeneration

In: Kittleson MD, Kienle RD, editors, Mosby, Small animal cardiovascular medecine; 297-318

Tilley LP, Smith FWK, Oyama MA, Sleeper MM

Acquired valvular heart disease in dogs and cats

In : Manual of canine and feline cardiology 4th edition

SISSON D, KITTLESON MD (1999)

Management of heart failure: principles of treatment, therapeutic strategies, and pharmacology

In: Fox PR, Sisson D, Moïse NS, editors, 2nd ed. Philadelphia WB Saunders, Textbook of canine and feline cardiology: principles and clinical practice, 1999; 216-250

D’un point de vue histologique, la dégénérescence myxoïde correspond à l’accumulation de glycosaminoglycanes au sein de la spongiosa et à la perte des fibres de collagène notamment au niveau de la fibrosa. Cela se traduit alors par une désorganisation tissulaire, cellulaire et moléculaire.

Ainsi, la spongiosa (riche en glycosaminoglycanes) s’épaissit au détriment de fibrosa (riche en fibres de collagène) qui tend même à disparaître notamment au niveau du bord libre des feuillets valvulaires.

Buchanan JW (1977)

Chronic valvular disease (endocardiosis) in dogs

Advt Vet Sci. 1977; 21: 57-10

Häggström J, Duelund Pedersen H, Kvart C (2004)

New insights into degenerative mitral valve disease in dogs

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Corcoran BM, Black A, Anderson H, Dukes McEvan J, French A (2002)

Investigation of mitral valve morphology in dogs with mitral valve endocardiosis using scanning electron microscopy

In : Proceedings of the 12th European College of Veterinary Internal Medecine/European Society of Veterinary Internal Medecine Congress. Munich, 2002: 178; 19-21

[pic]

FIGURE : Photographies d’un feuillet valvulaire d’un chien sain (A) et d’un chien atteint de MVD (B) illustrant l’épaississement de la spongiosa du feuillet atteint (coloration hématoxyline-éosine, X 50)

Oyama MA, Levy RJ (2010)

Insights into serotonin signaling mechanisms associated with canine degenerative mitral valve disease

J Vet Intern Med. 2010; 24: 27-36

Au sein de ces couches, les cellules interstitielles sont elles aussi atteintes ; une désorganisation intracellulaire touche le noyau, le cytosquelette, les mitochondries et le réticulum endoplasmique. Ces cellules, habituellement organisées dans l’alignement des fibres de collagène, se retrouvent désagencées. Le collagène présent dans la matrice extracellulaire se raréfie et ses fibres se fragmentent aggravant d’autant plus la désorganisation cellulaire et tissulaire. La différenciation cellulaire est elle aussi perturbée : les fibroblastes quiescents, responsables de l’homéostasie de la matrice extracellulaire, sont transformés en myofibroblastes actifs.

Han RI, Black A, Culshaw GJ, French AT, Else RW, Corcoran BM (2008)

Distribution of myofibroblasts, smooth muscle-like cells, macrophages, and mast cells in mitral valve leaflets of dogs with myxomatous mitral valve disease

Am J Vet Res. 2008; 69: 763-9

Disatian S, Ehrhart EJ 3rd, Zimmerman S, Orton EC (2008)

Interstitial cells from dogs with naturally occurring myxomatous mitral valve disease undergo phenotype transformation

Heart Valve Dis. 2008; 17: 402-1

Avec la perte de l’endothélium, la dégénérescence valvulaire atteint son paroxysme. En effet, cette couche joue un rôle prédominant dans l’intégrité cellulaire et tissulaire de la valvule. Les lésions endothéliales se localisent le plus souvent sur la surface atriale épargnant la couche ventriculaire. Dans les stades ultimes de la maladie, la matrice extracellulaire normalement protégée par l’endothélium est mise à nu. Cette perte endothéliale favorise l’agrégation plaquettaire et l’apparition de thrombi. Cependant, même si cette complication existe, elle reste étonnamment rare dans l’espèce canine.

Seki Y, Machida N, Arimura T, Kiryu K, Kondoh M (1998)

Transmural myocardial infarction caused by thromboembolism associated with mitral insufficiency in a dog

J Vet Med Sci. 1998; 60: 741-3

Corcoran BM, Black A, Anderson H, Dukes McEvan J, French A (2002)

Investigation of mitral valve morphology in dogs with mitral valve endocardiosis using scanning electron microscopy

In : Proceedings of the 12th European College of Veterinary Internal Medecine/European Society of Veterinary Internal Medecine Congress. Munich, 2002; 178: 19-21

Il est actuellement encore impossible de statuer précisément sur l’origine de tous ces changements tissulaires et cellulaires. Il semblerait cependant que la différenciation cellulaire des cellules valvulaires intertitielles (les fibroblastes quiescents) en myofibroblastes actifs soit une des clés de la pathogénie de la MVD. En effet, les cellules valvulaires interstitielles sont directement impliquées dans l’organisation des cellules et de la matrice extracellulaire des feuillets valvulaires. Leur transformation phénotypique en myofibroblastes actifs perturbe cette organisation (par la synthèse d’actine, de collagénases, de glycosaminoglycanes et autres molécules) et engendre la cascade de modifications structurales conduisant à la dégénérescence valvulaire. Des études, réalisées in vitro, ont démontré que les cellules valvulaires interstitielles de chiens atteints de MVD présentaient une augmentation de la synthèse des récepteurs membranaires à la sérotonine (5-hydroxytryptamine) et que la mise en présence de cette molécule avec lesdites cellules pouvait entrainer leur transformation phénotypique en myofibroblastes. De plus, la concentration plasmatique en sérotonine s’est révélée augmentée chez la plupart des chiens atteints de MVD mais aussi au sein de races prédisposées (CKC notamment). Les études à venir devront confirmer les résultats obtenus in vitro afin de préciser le rôle de la sérotonine dans la pathogénie de la MVD spontanée et l’application thérapeutique qu’il pourrait en découler.

Connolly JM, Oyama MA, Gorman RC, Gorman JH, Fulmer JT, Ryan K, Levy RJ (2006)

Serotonin transporter blockade with dexfenfluoramine or fluoxetine increases serotonin-mediated ERK1/2 phosphorylation in heart valve interstitial cells: implications for serotonin-related heart valve disease

Circulation 2006; 114: III-300

Connolly JM, Blamey C, Oyama MA, Gorman RC, Gorman JH, Fulmer JT, Ryan K, Levy RJ (2007)

Dexfenfluramine and fluoxetine increase serotonin-mediated signal transduction in mitral valve cells via serotonin transporter blockade, not direct serotonin receptor signaling

Society for Heart Valve Disease. 2007; 4th Biennial Meeting, New York City, NY: 15-8

Oyama MA, Levy RJ (2010)

Insights into serotonin signaling mechanisms associated with canine degenerative mitral valve disease

J Vet Intern Med. 2010; 24: 27-36

Comme son nom l’indique la dégénérescence myxoïde est un phénomène dégénératif, non associé, à priori, à une réaction inflammatoire. Cependant, si cela reste vrai dans les stades précoces de la maladie, de récentes études suggèrent l’activation de médiateurs de l’inflammation (comme la protéine C réactive et le TNF() et le rôle de ces derniers dans l’aggravation des lésions tissulaires.

Oyama MA, Chittur SV (2006)

Genomic expression patterns of mitral valve tissues from dogs with degenerative mitral valve disease

Am J Vet Res. 2006; 67:1307-18

Rush JE, Freeman LM, Brown DJ, Brewer BP, Ross JN, Markwell PJ (2000)

Clinical, Echocardiographic, and Neurohormonal Effects of a Sodium-Restricted Diet in Dogs with Heart Failure

J Vet Intern Med. 2000; 14: 513–20

2. Lésions vasculaires associées

Des lésions vasculaires similaires à une dégénérescence myxoïde sont parfois rapportées chez les chiens atteints de maladie valvulaire dégénérative. Ces lésions correspondent à un rétrécissement de la lumière vasculaire et à une perte d’élasticité de la paroi de certaines artères. Dans le cas des chiens atteints d’endocardiose valvulaire, les artères principalement concernées par l’artériosclérose sont les artères coronaires et celles des muscles papillaires.

Falk T, Jönsson L, Olsen LH, Pedersen HD (2006)

Arteriosclerotic changes in the myocardium, lung, and kidney in dogs with chronic congestive heart failure and myxomatous mitral valve disease

Cardiovasc Pathol. 2006; 15: 185-93

Les conséquences directes de telles lésions sont peu connues. Chez les chiens âgés non cardiopathes, l’artériosclérose est fréquente mais en général sans conséquence car peu sévère. Une étude rétrospective associe cependant des lésions avérées d’artériosclérose à des morts cardiaques brutales. Même si cette complication demeure rare lors de maladie valvulaire dégénérative, il serait intéressant de connaître l’impact éventuel des lésions d’artériosclérose sur le fonctionnement cardiaque.

Falk T, Jönsson L (2000)

Ischaemic heart disease in the dog : a review of 65 cases

J Small Anim Pract. 2000; 41: 97-103

3. Conséquences structurales

Les conséquences structurales ne sont pas immédiates lors de dégénérescence myxoïde. Il est nécessaire qu’une certaine proportion de l’appareil valvulaire soit atteinte pour que des modifications macroscopiques soient visibles.

Les lésions apparaissent d’abord au niveau des bords libres des feuillets valvulaires, là où les valves s’affrontent. La surface du côté atrial ainsi que les zones d’insertion des cordages tendineux sont aussi les premières atteintes. Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, la dégénérescence myxoïde s’aggrave et se propage à tout l’appareil valvulaire. Les feuillets s’amincissent, se contractent et des nodules apparaissent sur leur extrémité libre. Au stade ultime, les cordages tendineux sont atteints ; ils s’amincissent eux aussi et s’étirent jusqu’à leur rupture possible. Arbitrairement, la progression des lésions d’endocardiose a été décrite en quatre types décrits dans le tableau suivant.

Häggström J, Duelund Pedersen H, Kvart C (2004)

New insights into degenerative mitral valve disease in dogs

Vet Clin North Am Small Anim Pract. 2004; 34: 1209-26

Smith P (2006)

Management of chronic degenerative mitral valve disease in dogs

In Practice. 2006; 28: 376-383

|Type |Lésions décrites |

|Type I |Nodules sur le bord libre des feuillets |

|Type II |Fusion des nodules qui se multiplient |

| |Épaississement et irrégularité du bord libre des feuillets. |

| |Atteinte des cordages tendineux. |

|Type III |Défaut de coaptation des valves : insuffisance valvulaire. |

| |Bords libres contractés et enroulés sur eux mêmes. |

| |Allongement des cordages tendineux : risque de rupture. |

|Type IV |Insuffisance valvulaire. |

TABLEAU : Progression des lésions d’endocardiose selon Whitney.

KOGURE K (1980)

Pathology of chronic mitral valvular disease in the dog

Jpn J Vet Sci. 1980; 42: 323-335

WHITNEY JC (1974)

Observations of the effect of age on the severity of heart valve lesions in the dog

J Small Anim Pract. 1974; 15: 511-522

b. Origine génétique suspectée

La forte prédisposition de certaines races à la maladie valvulaire dégénérative suggère une origine génétique.

Olsen L, Fredholm M, Pedersen H (1999)

Epidemiology and inheritance of mitral valve prolapse in Dachshunds

J Vet Intern Med. 1999; 13: 448-56

De nombreuses études ont été effectuées à ce sujet, notamment chez les Cavalier King Charles. Dans cette race, un support polygénétique est fortement suspecté avec la nécessité de dépasser un certain seuil d’expression des gènes concernés pour que la maladie se déclare. Ce seuil serait plus bas chez les mâles ce qui expliquerait en partie la différence de prévalence de la maladie entre les deux sexes. Ainsi, au sein d’une même fratrie, les mâles déclarent la maladie de manière plus précoce que leurs sœurs.

De plus, des études relativement récentes ont établi une relation entre la précocité du souffle cardiaque chez les reproducteurs et la prévalence ainsi que l’intensité du souffle au sein de la descendance.

Swenson L, Häggström J, Kvart C, Juneja RK (1996)

Relationship between parental cardiac status in Cavalier King Charles Spaniels and prevalence and severity of chronic valvular disease in offspring

J Am Vet Med Assoc. 1996; 208: 2009-12

À partir de cette observation, les clubs de race de certains pays ont proposé aux éleveurs des recommandations concernant les reproducteurs. Ces derniers sont soumis à une surveillance clinique et échocardiographique afin de détecter le plus précocement possible tout signe de maladie valvulaire dégénérative. Les animaux présentant des anomalies précoces sont retirés de la reproduction. Il en va de même pour la descendance issue de reproducteurs atteints. Ce type de sélection semble logique, mais il pose la question de l’âge limite à partir duquel on considère que la maladie se déclare de manière précoce. Faut-il retirer de la reproduction les chiens (et leur descendance) qui présentent des signes avant 5, 6 ou 8 ans ? Actuellement, cet âge limite est fixé aux alentours de 5 ans le plus souvent. Les clubs de race ne peuvent pas se permettre d’imposer un âge plus jeune car, au sein de certaines races (et surtout en ce qui concerne le CKC), la prévalence de la maladie est telle que le nombre de reproducteurs devant être retiré de la reproduction serait beaucoup trop important. L’objectif à long terme, cependant, est de pouvoir abaisser cet âge limite au fur et à mesure de la sélection génétique.

Olsen L, Fredholm M, Pedersen H (1999)

Epidemiology and inheritance of mitral valve prolapse in Dachshunds

J Vet Intern Med. 1999; 13: 448-56

Häggström J, Duelund Pedersen H, Kvart C (2004)

New insights into degenerative mitral valve disease in dogs

Vet Clin North Am Small Anim Pract. 2004; 34: 1209-26

Si l’origine génétique de la maladie valvulaire dégénérative n’est plus à prouver, il reste cependant à la préciser. Grâce au développement du génie génétique, les gènes impliqués pourront, à plus ou moins court terme, être identifiés et le support génétique de la maladie valvulaire dégénérative sera peut-être enfin dévoilée.

Keene BW, Bonagura JD (2009)

Management of heart failure in dogs

In: Bonagure JD, Twedt DC, editors, Kirk’s current veterinary therapy, small animal practice. St-Louis: Elsevier Saunders; 2009, 769-86

III. ÉPIDÉMIOLOGIE

a. Généralités

La maladie valvulaire dégénérative est la maladie cardiaque acquise la plus fréquente dans l’espèce canine : elle représente ainsi 75% des cardiopathies acquises. Elle touche des chiens d’âge moyen à avancé avec une moyenne d’âge d’apparition du souffle cardiaque vers 6-7 ans.

Tous les chiens peuvent être atteints avec cependant une différence raciale notable : les chiens de petites races sont plus fréquemment atteints que les chiens de grandes races et les prévalences les plus élevées sont obtenues pour les races Cavalier King Charles, Teckel et Shi Tzu.

Keene BW, Bonagura JD (2009)

Management of heart failure in dogs

In: Bonagure JD, Twedt DC, editors, Kirk’s current veterinary therapy, small animal practice. St-Louis: Elsevier Saunders; 2009, 769-86

Cette différence raciale ne se limite pas qu’à la prévalence de la maladie ; selon la race, l’évolution de la maladie peut être très différente. Ainsi, au sein des grandes races, la maladie valvulaire dégénérative est en général d’évolution plus rapide avec une atteinte précoce de la fonction myocardique.

Autre différence épidémiologique importante, la prévalence est plus forte chez les mâles que chez les femelles ; les mâles sont ainsi 1,5 fois plus atteints que les femelles et l’âge d’apparition du souffle cardiaque est en moyenne plus tardif chez ces dernières.

Keene BW, Bonagura JD (2009)

Management of heart failure in dogs

In: Bonagure JD, Twedt DC, editors, Kirk’s current veterinary therapy, small animal practice. St-Louis: Elsevier Saunders; 2009, 769-86

Serfass P, Chetboul V, Sampedrano CC, Nicolle A, Benalloul T, Laforge H, Gau C, Hébert C, Pouchelon JL, Tissier R (2006)

Retrospective study of 942 small-sized dogs: Prevalence of left apical systolic heart murmur and left-sided heart failure, critical effects of breed and sex

J Vet Cardiol. 2006; 8: 11-8

L’épidémiologie de la maladie valvulaire dégénérative a été principalement étudiée chez les chiens de petites races ; l’extrapolation possible de ces données pour les chiens de grandes races n’est pour l’instant pas prouvée.

b. Cas particulier du Cavalier King Charles

La prévalence de la maladie valvulaire dégénérative étant élevée au sein de la race du Cavalier King Charles, cette dernière a fait l’objet de nombreuses recherches scientifiques et a servi de modèle expérimental pour l’étude de la maladie.

Il faut cependant considérer le Cavalier King Charles comme un cas particulier dont les caractéristiques concernant la maladie valvulaire dégénérative ne sont pas toujours extrapolables aux autres races. En effet, au sein de cette race, la maladie se déclare précocement (dès l’âge de 3-4 ans pour les mâles et dès l’âge de 4-5 ans pour les femelles) et évolue aussi de manière plus rapide. Ainsi, selon les pays, 40 à 60% des Cavalier King Charles de plus de quatre ans présentent un souffle cardiaque.

DARKE PGG (1987)

Valvular incompetence in Cavalier King Charles spaniels

Vet Rec. 1987; 120: 365-366

Serfass P, Chetboul V, Sampedrano CC, Nicolle A, Benalloul T, Laforge H, Gau C, Hébert C, Pouchelon JL, Tissier R (2006)

Retrospective study of 942 small-sized dogs: Prevalence of left apical systolic heart murmur and left-sided heart failure, critical effects of breed and sex

J Vet Cardiol. 2006; 8: 11-8

Häggström J, HANNSON K, KVART C, SWENSON L (1992)

Chronic valvular disease in the Cavalier King Charles spaniel in Sweden

Vet Res. 1992; 131: 549-553

Une partie de l’explication réside dans le fait que le prolapsus mitral (irruption des valvules mitrales dans l’atrium gauche au moment de la systole) est très fréquent chez le Cavalier King Charles et qu’il pourrait être lui-même à l’origine des lésions d’endocardiose. Cette particularité raciale reposerait sur un support génétique selon un mode polygénique non encore élucidé.

Il se pourrait aussi que l’état de nervosité important de ces petits chiens influe sur l’évolution de la maladie par action du système nerveux autonome sur le cœur ; le prolapsus mitral serait alors secondaire à une stimulation vagale/sympathique ? augmentée.

PEDERSEN HD (2000)

Mitral valve prolapse in the dog: pathogenesis, pathophysiology, diagnosis and comparative aspects of early myxomatous mitral valve disease

Thèse Med Vet., Copenhague, 2000; 100p

Pedersen HD (1999)

Echocardiographic mitral valve prolapse in cavalier King Charles spaniels: epidemiology and prognostic significance for regurgitation

Vet Rec. 1999; 144: 315

c. Facteurs de risque

Les facteurs de risque d’une maladie correspondent à des états physiologiques ou pathologiques particuliers et à l’environnement du patient pouvant être associés à une incidence accrue de la maladie et/ou à une progression plus rapide de celle-ci.

Dans le cas de la maladie valvulaire dégénérative, les facteurs de risque préalablement cités sont liés à la race, à l’âge et au sexe. Ils représentent le risque pour un chien sain de développer une endocardiose valvulaire.

Les figures présentées ci-dessous sont issues d’une étude rétrospective française de 2005 évaluant la prévalence de la MVD (par la présence d’un souffle cardiaque systolique apexien gauche et/ou d’une insuffisane cardiaque gauche) au sein des six petites races de chiens les plus représentées en France (Yorkshire, Bichon, Teckel, Caniche, Lhassa Apso et Shi Tzu). Les valeurs obtenues ont été comparées avec les résultats d’une précédente étude française ne concernant que les CKC et les variations liées à la race et au sexe ont été étudiées. La prévalence du souffle cardiaque au sein des six petites races de chiens étaient de 14,4 ± 2,2%, bien inférieure à celle obtenue lors de l’étude sur les CKC (40,6 ± 4,5%). La prévalence augmentait significativement avec l’âge (p ................
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