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LA SOPHIALE MARIA DE NAGLOWSKA SA VIE - SON OEUVRE

Marc Pluquet ?Eug?nie Pluquet Editions Gouttelettes de Ros?e, 44 rue de la Dysse 34150 Montpeyroux

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Maria de NAGLOWSKA est n?e le 15 Ao?t 1883 ? SAINT PETERSBOURG. Elle ?tait la fille du Lieutenant G?n?ral Dimitri de NAGLOWSKI, Gouverneur de la province de Kazan, et de Catherine KAMAROFF.

Son p?re, avec le G?n?ral GOURKO, avait chass? les Turcs des Balkans, ce qui lui valut le poste de Gouverneur; il fut empoisonn? au cours d'une partie d'?checs par un Nihiliste qui ?tait devenu familier de la maison. Sa m?re, un aristocrate russe, lui donna une ?ducation soign?e; mais elle mourut en 1895, alors que Maria n'avait que 12 ans. De sant? fragile, elle eut une enfance difficile, mais elle surprenait son entourage par ses remarques a l'emportepi?ce et par son comportement raisonnable bien qu'impr?visible.

Orpheline, elle fut prise en charge par sa tante qui la confia a l'Institut Smolna de Saint P?tersbourg, ?tablissement r?serv? strictement ? l'aristocratie. Elle y fit de brillantes ?tudes et retourna ensuite vivre chez sa tante. Devenue une jeune fille r?serv?e, tr?s ?prise de savoir, elle fr?quenta les Hautes Ecoles de Saint P?tersbourg, tout en s'int?ressant aux probl?mes de son ?poque.

Les id?es gui proc?d?rent les ?v?nements de l905 se r?pandaient dans toutes les couches sociales, et Maria, avec sa sensibilit?, sa grande lucidit?, se sentit concern?e. De par ses origines et son ?ducation, elle aurait pu avoir un destin tout trac?, mais cela elle ne pouvait l'accepter.

C'est ? cette ?poque qu'elle fr?quenta des cercles plut?t ferm?s. Elle y rencontra des hommes d'exp?rience, de toutes disciplines et sa connaissance du monde fit de rapides progr?s.

Puis, un jour qu'elle ?coutait un concert, elle fut attir?e par la personnalit? du violoniste soliste; l'idylle qui s'ensuivit posait ? Maria et ? HOPENKO, son fianc?, des probl?mes insolubles : la famille n'accepterait jamais cette alliance; HOPENKO ?tait musicien instrumentiste et juif - Maria ?tait noble et orthodoxe. Le couple dut quitter la Russie. Ils s'install?rent d'abord a Berlin o? ils men?rent, avec ce qu'ils avaient pu emmener de Russie, une vie relativement facile; mais cala ne dura qu'un temps, ils durent partir pour la Suisse.

A Gen?ve o? ils se mari?rent, Maria continua d'?tudier a l'Universit? en suivant les enseignements de plusieurs facult?s simultan?ment; ? cot? de ses ?tudes, elle fonda une ?cole pour ?tudiants russes, abondants ? cette ?poque ? l'Universit? de Gen?ve, qui ne poss?daient pas assez de fran?ais pour la r?daction de leurs divers travaux. Cette ?cole fleurit et rapportait bien, ce qui permit a son mari de suivre des ?tudes au Conservatoire de musique et ainsi il devint virtuose du violon. C'est pendant cette p?riode que trois enfants naquirent : Alexandre, Marie et Andr?.

Maria ?tait en butte aux conflits qui opposaient les r?fugi?s russes dont La colonie tr?s importante intervenait dans l'?ducation des enfants; mais l'influence juive ?tait tr?s active, Alexandre fut circoncis et Marie fut d?clar?e a la mairie sous le nom d'Esther.

Andr? ne fut pas circoncis et n'eut pas un nom juif, ce qui, par la suite, lui causa d'abord bien des d?sagr?ments, mais, pendant la guerre, lui ?vita la d?portation.

La colonie russe qui avait, au d?but, aid? le couple, traduisit son m?contentement en supprimant son aide, et le m?nage connut ? nouveau des difficult?s.

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HOPENKO continuait ses ?tudes et Maria enseignait dans des ?coles priv?es.

Mais HOPENKO ?tait devenu Sioniste, il connaissait personnellement HERZL, et voulait partir en Palestine. Marie fit plusieurs voyages en Russie pour obtenir une part de ses biens et faire reconna?tre son mariage. Mais la famille fut impitoyable; Maria n'?tait, pour eux, qu'une fille-m?re et devait supporter la honte inh?rente ? sa condition - ils n'attribu?rent jamais de valeur ? son mariage civil.

Peu avant La naissance d'Andr?, HOPENKO partit en Palestine o? les Sionistes lui offrirent la direction du Conservatoire de musique, poste qu'il occupa 40 ans, soit jusqu'? sa mort, laissant sa femme se d?brouiller avec ses enfants. Courageusement Maria s'organisa pour faire face ? cette adversit?; elle continua d'enseigner; les Russes de Gen?ve La r?int?gr?rent dans leur clan; les enfants furent rebaptis?s, mais ses concitoyens ne l'aid?rent plus; pour eux c'?tait quand m?me une m?re c?libataire; de plus elle faisait preuve d'un peu trop d'originalit?, tant dans ses propos que dans sa mani?re de vivre.

Maria ?tait une m?re admirable. Aid?e par une gouvernante marseillaise, elle donna une tr?s bonne ?ducation a ses enfants. Tout allait bien, mais Maria voulait s'exprimer et elle se mit ? faire des conf?rences et du journalisme; elle ?tait pleine d'entrain, et se fit rapidement des relations, et m?me des amis; elle ?tait avenante, pleine de gaiet? et d'esprit - elle aurait pu se refaire une existence plus s?curisante, mais elle avait d'autres projets. Cette p?riode euphorique ne dura qu'un temps; en Suisse, ? l'?poque, ce qu'elle disait et ?crivait ne pas ait pas inaper?u.

Une conf?rence sur La Paix donn?e dans La Salle de l'Ath?n?e a Gen?ve, et le livre qu'elle fit para?tre ensuite, lui valurent d'?tre emprisonn?e, accus?e d'espionnage et d'activit? politique, elle ne fut lib?r?e que sur l'intervention d'une haute personnalit?.

La ville de Gen?ve lui ?tait interdite, elle dut s'installer ? Berne o? elle ne connaissait personne; les enfants furent plac?s dans une pension a Interlacken et ?tudi?rent dans une ?cole allemande.

A Berne, pour des motifs inconnus, elle fut jug?e ind?sirable et dut partir pour B?le; c'?tait une expulsion en r?gle, mais B?le n'?tait pas plus accueillante et Maria dut confier Andr? et Marie a l'Assistance Publique de Gen?ve - l'a?n? Alexandre ?tant parti en Palestine chez son p?re.

Maria, gr?ce ? un passeport polonais put partir pour l'Italie. C'?tait, apparemment, La fin d'un cauchemar; elle s'installa a Rome : un ami qu'elle avait connu a Gen?ve lui donna une partie de son vaste appartement. Elle se remit ? enseigner puis devint r?dactrice au Journal "Italie". En 1920 La vie en Italie ?tait difficile; il y avait des troubles et une grande effervescence politique.

Maria fit venir ses enfants rest?s a Gen?ve. Alexandre ?tait en Palestine, chez son p?re. Gr?ce ? l'ami qui aidait fraternellement Maria, la vie en Italie s'organisa de fa?on satisfaisante. Les facilit?s que le bon samaritain suisse procurait a la famille de nouveau r?unie firent brusquement d?faut, l'ami providentiel repartit en Suisse et peu apr?s se suicida.

Cet ?v?nement fut le pr?lude d'une suite d'al?as impr?visibles, Maria perdit sa place, elle dut quitter l'appartement; Andr? ?choua aux examens et dut quitter le coll?ge. Il fallut repartir ?

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z?ro, vivre dans une chambre a peine meubl?e, accepter de donner des le?ons ? n'importe quel prix, vivre le plus simplement possible.

Mais cette adversit? revenue eut le don de galvaniser Maria; sans se d?courager, elle se remit au travail avec acharnement et peu a peu la vie s'organisa tant bien que mal. Andr? trouva une place de chasseur dans un grand h?tel, puis Maria retrouva sa place au journal Italie; Marie, sur les conseils de sa m?re, apprit le m?tier d'infirmi?re; Alexandre, en Isra?l, s'occupait de chevaux, ce qui ?tait sa vocation; la vie reprit son cours normal.

Marie, ?g?e de 16 ans, tomba malade, une ?pid?mie de typhus s?vissait a Rome et fit grand nombre de morts. Apr?s trois mois d'h?pital, elle passa deux ans comme novice dans le couvent de celui-ci. Puis, retourn?e ? la vie s?culaire, elle trouva du travail comme infirmi?re chez un dentiste. Alexandre entra dans une ?cole d'agriculture pr?s de Tel'Aviv et, par la suite, Andr? partit chez son p?re qui dirigeait un conservatoire de musique a Tel'Aviv.

Maria resta seule avec sa fille a Rome. Elle s'?tait fait, ? cette ?poque, de nombreuses relations. Elle fr?quentait un groupe d'?crivains occultistes pour la plupart, elle ?crivait beaucoup, mais ne publiait rien, les conditions de vie que les ?trangers subissaient en Italie ne le permettaient pas.

C'est au cours de ces r?unions a caract?re ?sot?rique qu'elle fit la connaissance d'un philosophe Russe qui lui r?v?la la tradition Bor?enne dans ses aspects les plus secrets; cet homme avait s?journ? de nombreuses ann?es dans un monast?re situ? pr?s du Lac Ba?kal en Sib?rie; il avait ?galement voyag? en Europe, en Asie et en Am?rique.

Les ann?es qui suivirent ces ?v?nements permirent ? Maria d'?crire un certain nombre de textes qui constitu?rent les bases de son enseignement.

Alexandre, le fils a?n? de Maria, r?ussit a se faire une bonne situation a Alexandrie, il fit venir Maria et sa soeur Marie, et par la suite son fr?re Andr? qui ?tait tr?s heureux en Palestine; son p?re, bien que non divorce, avait ?pous? une musicienne juive avec qui il avait aussi des probl?mes insolubles. Andr? avait appris l'h?breu mais au d?triment des autres ?tudes et sa mar?tre ne voulait pas le voir. Mais la famille ?tait ? nouveau r?unie et ce la comptait plus que toute chose pour Maria.

En Egypte, Maria fut sollicit?e pour faire des conf?rences, des causeries-d?bats, organiser des r?unions, notamment a la Soci?t? Th?osophique d'Alexandrie. R?dactrice au journal "La Bourse Egyptienne", elle finit par ?tre tr?s connue.

Marie se maria avec un ing?nieur Suisse, chef m?canicien de la centrale ?lectrique des trams d'Alexandrie.

En l'ann?e 1930, la famille se dispersa ? nouveau. Alexandre avait chang? de caract?re, s'?tait mari?, et voulait se consacrer a son foyer. Marie partit en Suisse avec son mari, Andr? dut retourner ? Tel-Aviv chez son p?re. Maria revint a Rome, ses amis lui trouv?rent une place dans une maison d'?dition de France dont le si?ge ?tait ? Paris.

Mais a Paris, apr?s avoir attendu plusieurs mois, pour permettre de recevoir les renseignements que la Suisse pouvait fournir sur Maria de NAGLOWSKA, on lui confirma qu'elle ne pourrait avoir d'autorisation de travail en France; Maria pensait que l'Ambassade de

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France a Alexandrie ?tait aussi pour quelque chose dans ce refus cat?gorique.

En ces quelques mois d'attente, elle avait ?puis? toutes ses ?conomies. Elle connut de ce fait une mis?re insupportable, si elle avait dur?, mais elle eut la pr?sence d'esprit de venir vivre a Montparnasse, dans ce milieu cosmopolite o? ?crivains , artistes, philosophes vivaient en symbiose, ou la boh?me avait ses coud?es franches. Maria fit des rencontres b?n?fiques, elle organisa sa vie en fonction de ce milieu aux multiples aspects; elle logeait dans une chambre d'h?tel, rue Br?a, utilisait la Rotonde comme lieu de rendez-vous, mais aussi de bureau et m?me de salon. Elle d?m?nagea ses p?nates a la Coupole car le fond de la salle pr?s du jardin d'hiver, connu sous le nom de carr? des occultistes, lui convenait plus particuli?rement.

Maria fit venir son fils Andr? a Paris; cela n'alla pas sans mal et, apr?s maintes aventures, il arriva a Paris, mais lui aussi ne put avoir une autorisation de travailler en France, et fut m?me d?clar? apatride par le Minist?re des affaires ?trang?res.

Andr? ?tait d?brouillard, il r?ussit a devenir placier en feuilletons p?riodiques, sa client?le ?tait les petits magasins, les concierges de Paris et de la banlieue. Il gagnait suffisamment pour faire vivre sa m?re et lui-m?me, ce qui permit ? Maria de se consacrer a son oeuvre. Elle fit ?diter un journal - La Fl?che - loua un jour par semaine le studio Raspail, rue Vavin, pour y faire ses conf?rences.

C'est a cette ?poque que j'eus la chance inesp?r?e de rencontrer celle qui fut ma m?re spirituelle, que je nomme maintenant la Grande Sophiale Maria DE NAGLOWSKA. C'est Claude d'Igee qui me pr?senta a Maria DE NAGLOWSKA et je lui en fus reconnaissant.

LES PREMIERS DISCIPLES

J'ai connu Claude d'IGEE (son vrai nom ?tait LABLATINIERE) ? Bitche pendant mon service militaire en 1933; il ?tait infirmier a l'h?pital Roca.

J'?tais atteint, quant ? moi, d'une maladie chronique que l'on pouvait appeler la casernite : hospitalis?, je me portais comme un charme; d?s que l'on me renvoyait a la Compagnie de tirailleurs o? j'?tais affect?, ma sant? devenait chancelante : fi?vre, naus?e, bronchite, parasitose, etc ... Le temps d'une visite ou deux et je me retrouvais a l'h?pital. La p?riode des classes termin?e, le commandant m?decin me garda comme infirmier de salle de soins. On me confia ?galement les travaux d'entretien de l'h?pital.

Le temps que me laissaient les ventouses scarifi?es ou les pansements, piq?res et autres soins, je le consacrais a Claude qui, lui, avait la responsabilit? d'une salle de pseudo-malades ...

Je passais avec lui des soir?es passionnantes, nous ne sortions pour ainsi dire jamais de l'h?pital, nous ne demandions pas de permissions nous avions des livres et d'innombrables sujets de discussion.

Mon app?tit de connaissance ?tait devenu boulimique et Claude ?tait un bon professeur.

Les revers de fortune de mes parents m'impos?rent de travailler d?s l'?ge de 12 ans et j'appris successivement la plupart des m?tiers du b?timent. A 20 ans j'?tais chef de chantier ? la Mecalux ? Paris, je travaillais ? la construction de l'Ambassade Am?ricaine, place de la

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Concorde.

Je savais faire des tas de choses, mais ? part ce que m'avaient apport? quelques compagnons libertaires, je n'avais pas meubl? mon esprit, je n'avais pas ouvert un livre depuis mon certificat d'?tudes.

Gr?ce ? Claude je commen?ais ? rattraper ce retard, certes il y manquait un peu de m?thode. Je connaissais Rimbaud, Lautreamont, Jarry, Roussel, mais pas Racine ni Corneille, ni Montaigne.

Claude s'int?ressait ? l'?sot?risme, ? l'alchimie; il connaissait la Kabbale et d'autres choses myst?rieuses, qui me fascinaient.

Peu avant notre d?mobilisation, Claude me demanda ce que je ferais en recouvrant ma libert?. Je lui exposais mon intention de partir tr?s loin, apr?s avoir construit un petit voilier dont je lui montrai les plans .

Quelques jours plus tard il me dit : "Ce n'est pas un petit bateau qu'il faut faire, c'est un grand, o? l'on pourra se r?unir et faire des choses int?ressantes. Viens a Paris, je te pr?senterai ? une femme extraordinaire. Tu n'as plus de famille et a Montparnasse tu ne te sentiras plus seul".

Je connaissais l'existence d'anciens dragueurs de mines en b?ton arm? coul?s dans les darses de Bonneuil et je me rendis sur les lieux pour acheter une ?pave, mais personne ne put me donner la marche ? suivre pour r?cup?rer un ce ces bateaux (ce n'est que quelques ann?es plus tard que je r?ussis ? en r?cup?rer deux). De guerre lasse, j'achetai un ponton am?nag? en houseboat.

Je transformai cette sorte de p?niche pour lui donner du caract?re et je l'amarrai sous la passerelle de l'?lectricit? ? Alfortville.

Ensuite, je partis a la recherche de Claude, il m'avait donn? comme rep?re la Rotonde - le D?me ou la Coupole. C'est au D?me que je l'ai trouv?. "Le bateau est pr?t", lui dis-je, "Le bateau ? quel bateau ? fit-il, en me regardant l'oeil ?tonn?; il ajouta : "Non c'est pas possible ! mais c'est formidable ! Viens, je vais te pr?senter mes amis".

Il y avait l? Jean CARTERET, Camille BRYEN, Eddy REINHART, Germaine RICHIER. Je demandais s'il me pr?senterait ? Maria DE NAGLOWSKA, il me dit bien s?r, mais elle ne sera la qu'en fin de soir?e; elle fait une conf?rence au groupe Bordy Theano, de toute fa?on nous passerons la nuit ? Montparnasse comme a l'accoutum?e.

C'est ce soir-la que je vis Maria DE NAGLOWSKA pour la premi?re fois. Elle me regarda longuement, ses yeux d'un bleu limpide m'impressionnaient, je n'avais jamais vu un tel regard; mes cheveux courts, mes v?tements neufs de confection, mon allure un peu gauche me d?marquaient de la "faune" montparnassienne; j'en ?tais conscient et cela me mettait mal a l'aise.

Maria me fit asseoir pr?s d'elle et me questionna longuement sur mes origines, ce que j'avais fait, ce que j'attendais de la vie. Quand je la quittais j'?tais dans un ?tat d'exaltation intense, j'?tais heureux et la vie me semblait magnifique.

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Je m'accoutumai promptement ? la vie de Montparnasse. J'?tais consid?r? aux trois brasseries comme le Robinson de la Seine, le plombier philosophe, le cerveau lent, celui qui payait volontiers les consommations, toujours pr?t a rendre service.

En 1935, je descendis mon bateau jusqu'au Pont de S?vres; on venait d'y ouvrir une station de m?tro.

C'est ? cette ?poque que Claude d'IGEE et moi entrepr?mes des recherches sur les plantes osmotiques, d'apr?s un vieux trait? d'alchimie de POISSON et des travaux de St?phane LEDUC.

J'assistais a toutes les conf?rences et aux rites pr?liminaires de Maria DE NAGLOWSKA; elle donnait ses conf?rences le mercredi au studio Raspail, 36 rue Vavin. J'allais aussi vendre la Fl?che, organe d'action magique, a la sortie des conf?rences et des r?unions concernant l'?sot?risme; je portais les livres et les documents aux adresses qu'elle me donnait.

Maria vivait tr?s simplement. La direction de la Coupole lui offrait chaque soir un potage St Germain et le prix de ses nombreux caf?s noirs se r?duisait au pourboire du gar?on. Monsieur LAFOND, le g?rant, s'y retrouvait, la table que Maria occupait ?tait situ?e dans le carr? des occultistes (renfoncement contigu au jardin d'hiver).

Sa table restait toujours occup?e par des gens qui venaient la voir et eux consommaient copieusement.

La plupart du temps ces visiteurs, qui n'?taient pas des habitu?s de la Coupole, me paraissaient insolites; ils s'exprimaient dans toutes les langues et rarement en fran?ais.

Maria parlait pour autant que je m'en souvienne, l'anglais (elle avait traduit Magia Sexualis de RANDOLPH), le russe (sa langue maternelle), l'allemand et le fran?ais (par ses ?tudes a St P?tersbourg), l'italien (elle avait ?t? r?dactrice en Italie), le yddisch (son mari ?tait juif eskanaze), pour le tch?que, le polonais, l'espagnol, elle se d?brouillait, elle parlait ?galement un peu l'arabe, l'h?breu et le latin.

Un soir qu'elle discutait avec Marc SEMENOF qui avait traduit la Kabbale de Serge MARCOTOUN, un professeur de langue orientale se joignit ? eux et la conversation porta sur les racines sanscrites. J'eus la surprise de constater que peu ? peu les r?les s'inversaient : ? la fin de l'entretien on avait l'impression que c'?tait Maria le professeur.

Tous les apr?s-midi Maria allait se recueillir ? l'?glise de Notre-Dame des Champs; je l'accompagnais quelquefois; ? l'heure ou` nous y allions il n'y avait personne dans l'?glise. Personnellement je m'y ennuyais car si je tentais de lui parler, elle me faisait taire gentiment mais fermement, ensuite, elle regagnait sa chambre de la rue Br?a et se pr?parait soit pour faire sa conf?rence au studio Raspail, soit pour aller a une r?union; sinon elle venait ? la Coupole vers les sept heures du soir.

Aux conf?rences il n'y avait, quand la salle ?tait pleine, que 30 a 40 personnes; quelques-unes n'entraient pas mais se postaient derri?re la baie vitr?e qui s?parait la salle de l'entr?e.

Une certaine Madame BLUMENTAL assistait de cette fa?on ? toutes les conf?rences, ainsi qu'aux rites pr?liminaires de la Messe d'Or, elle disait qu'ainsi elle pourrait jurer n'avoir

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